Avec “Le Fil”, Daniel Auteuil a mis en scène un film de procès passionnant sur un féminicide. Haletant de bout en bout, “Le Fil” s’inspire d’une terrible histoire vraie, survenue dans le nord de la France et d’abord racontée par l’avocat de l’accusé lui-même. (SPOILERS)
Le Filgrand thriller de la rentrée
Pour cette fin d’été, le cinéma français propose un bon nombre de films très réussis. Parmi ceux-là, certains viennent de l’édition du Festival de Cannes 2024. Il ya par exemple Le roman de Jim et Émilie Pérezainsi que Le Filnouvelle réalisation de Daniel Auteuil. Celui-ci, thriller judiciaire sombre et retors, après sa réception chaleureuse sur la Croisette, est ainsi dans les salles depuis le 11 septembre 2024 (notre critique ici).
Brillamment mené, Le Fil raconte l’histoire de Jean Monier (Daniel Auteuil), avocat pénaliste qui revient à une affaire de meurtre, des années après avoir fait acquitter un coupable et récidiviste. Marqué par cette expérience, il n’avait plus défendu d’accusé de meurtre depuis, mais le cas de Nicolas Milik (Grégory Gadebois) le touche et l’obsède. Celui-ci, accusé du meurtre de sa femme, clame son innocence. Mais rien n’indique qu’il est innocent, et les quelques éléments de preuves du dossier semblent au contraire désigner le coupable. Envers et contre tout, convaincu de son innocence, Jean Monier va le défendre et espérer son acquittement.
Une terrible histoire vraie (SPOILERS)
Le Fil s’inspire d’un premier récit, publié par Maître Mô sur son blog en 2011 et intitulé Au Guet-apens. Ce récit, l’avocat Jean-Yves Moyart l’a fait comme il le faisait pour les autres, en assumant sa subjectivité, ses doutes, en entraînant sa relation à son « client ». Ainsi, plus que l’affaire en elle-même, l’idée est de raconter des émotions, un cheminement de pensée, des humanités dans un tribunal, face aux crimes et à la machine judiciaire qui traite ces crimes. C’est ainsi cette personnalité, celle d’un avocat et de ses failles, qui fait la ligne directrice du film de Daniel Auteuil.
Mais les faits de ce récit subjectif, l’affaire ne s’occupe pas de Jean Monier dans Le Fil et Jean-Yves Moyart lui-même dans son texte, est bien une histoire vraiesurvenu une dizaine d’années avant le récit de 2011. Les faits sont réels, mais les prénoms ont été modifiés.
Cette affaire de meurtre concerne, un matin dans un petit village du Nord, la dans un fossé du corps découverte de Geneviève, égorgée dans la nuit. Tout de suite, les soupçons pèsent sur son mari Ahmed, le couple et les parents de 6 enfants s’étant violemment – et à nouveau – combattent la veille. Ahmed s’est rendu au bar de son ami Roger pour s’en plaindre, et Geneviève, ivre et furieuse, est alors partie seule dans la nuit. Devant la police, Ahmed ni en bloc. Il n’a pas tué sa femme, ni seul ni avec Roger, avec qui il a pourtant évoqué, tard dans son bar la nuit du meurtre, vouloir s’en “débarrasser”.
La dénégation totale
Ahmed ne cessera jamais de nier. Les témoignages s’accumulent, la compagne de Roger raconte que celui-ci est rentré ivre la nuit du meurtre, et s’est effondré tout habillé sur le lit en soufflant”putain je l’ai fait, je l’ai fait…”. Dans son bar, l’arme qui tout désigne comme celle du crime est vite retrouvée, un couteau de survie cranté avec une poignée “américaine”, fraîchement nettoyée. Mais les deux hommes nient.
L’instruction de l’affaire prend du temps, et Ahmed et Roger sont détenus pendant celle-ci, chacun dans une prison différente. Pendant la détention, avant leur procès, Roger meurt. L’avocat, saisissant l’opportunité de faire admettre à Ahmed que Roger a tué sa femme – les éléments matériels tendant à accuser plus Roger du geste qu’Ahmed -, tente alors de le convaincre de “charger” son ancien ami. Peine perdue, parce qu’Ahmed refuse que Roger soit accusé, et maintient que Roger n’a rien fait.
Ahmed ne se défend pas très bien, et ne fait pas bonne impression aux jurés de la cour d’assises. Mais le dossier est très fragile. Aucun mobile n’apparaît : si Ahmed avait un temps pensé au divorce, il n’était pas allé au bout de cette idée. Et il n’aurait tiré aucun bénéfice financier ni du divorce ni de la mort de sa femme. Et surtout, il apparaît à l’avocat comme très amoureux de sa femme, et protecteur de ses enfants. Les éléments à charge sont réels et bien établis, mais il manque le mobile : puisqu’il n’est pas irresponsable ou déraisonnable, “pourquoi” Ahmed aurait-il tué sa femme ? L’avocat le ressent trop profondément, il est convaincu : Ahmed est innocent.
Des aveux d’abord mystérieux… (SPOILERS)
À l’issue du délibéré, les jurés et les magistrats de la cour d’assises jugent Ahmed coupable et le condamnent à 20 ans de réclusion criminelle. Effondré, stupéfait, déçu, l’avocat se rend aux côtés d’Ahmed, dans la geôle du tribunal, avant son départ pour la prison. Alors qu’il vient pour essayer de lui remonter le moral et lui proposer de faire appel de la décision, il tombe violemment des nues. Sourianant, Ahmed lui fait alors un terrible aveu.
Allez, Maître, je ne pouvais pas vous le dire vraiment, je sais que je vous aurais déçu… Mais oui, je l’ai fait. Je l’ai fait… C’est pour ça que je ne voulais pas que vous accusez Roger, quand il était encore en vie, le malheureux : il était là, il a tout vu, mais tout ce qu’il a fait, c ‘est-ce que je laisse prendre son couteau…
Sonné, l’avocat articule néanmoins un “pourquoi ?“. À cette question, Ahmed ne répond rien et se contente de secouer la tête. Détruit par ses illusions, terrassé par l’aveu de son client qu’il pensait viscéralement innocent, l’avocat pense que l’affaire s’arrête là. , et qu’il n’obtiendra jamais d’Ahmed le mobile du meurtre.
Une résolution entière tardive
Mais sept ans plus tard, la brigade des mineurs contacte le cabinet de l’avocat, déclaré qu’ils ont un Ahmed en garde à vue et que celui-ci demande à lui parler. Parce qu’Ahmed est détenu depuis sa condamnation pour meurtre, l’avocat réalise que c’est vraisemblablement pour des faits antérieurs qu’il est placé en garde à vue. Ahmed va alors lui raconter un passé familial aussi secret que terrifiant, et alors expliquer pourquoi il a tué sa femme…
C’est ainsi, dans toin épilogue terrifiant et saisissantque se conclue Le Fille film étant très fidèle à l’histoire vraie du récit de Maître Mô, et dont on ne dévoilera pas ici les éléments ultimes et terribles.